Allez les yeux invisibles vers le beau.

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25/04/2009

Les Effarés (Rimbaud)

Les Effarés


Noirs dans la neige et dans la brume,

Au grand soupirail qui s'allume,

Leurs culs en rond,


A genoux, cinq petits, - misère ! -

Regardent le boulanger faire

Le lourd pain blond...


Ils voient le fort bras blanc qui tourne

La pâte grise, et qui l'enfourne

dans un trou clair


Ils écoutent le bon pain cuire.

Le boulanger au gras sourire

Chante un vieil air.


Ils sont blottis, pas un ne bouge

Au souffle du soupirail rouge,

Chaud comme un sein.


Et quand pendant que minuit sonne,

Façonné, pétilllant et jaune

On sort le pain ;


Quand, sous les poutres enfumées,

Chante les croûtes parfumées,

Et les grillons ;


Quand ce trou chaud souffle la vie ;

Ils ont leur âme ravie

Sous leurs hailllons,


Ils se ressentent si bien vivre,

Les pauvres petits plein de givre,

- Qu'ils sont là, tous,


Collant leurs petits museaux roses

Au grillage, chantant des choses

Entre les trous,


Mais vien bas - comme une prière !...

Repliés vers cette lumière

Du ciel rouvert,


_ Si fort, qu'ils crèvent leur culotte

_ Et que leur lange blanc tremblote

Au vent d'hiver...

 

(Poème d'Arthur Rimbaud in Poésies)

07:42 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie

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