Allez les yeux invisibles vers le beau.

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10/08/2010

une brève histoire de l'avenir...(10)

 

images.jpegPuis, vers 2050, le marché, par nature sans frontières, l'emportera sur la démocratie, institutionnellement circonscrite à un territoire. Les Etats s'affaibliront ; de nouvelles technologies nanométriques réduiront les consommations d'énergie et transformeront les ultimes services encore collectifs : la santé, l'éducation, la sécurité et la souveraineté ; de nouveaux objets de consommation majeurs apparaîtront, que je nomme des surveilleurs, permettant de mesurer et contrôler la conformité aux normes : chacun deviendra son propre médecin, professeur, contrôleur. L'économie sera de plus en plus économe en énergie et en eau. L'autosurveillance deviendra la forme extrême de la liberté et la peur de ne pas satisfaire à des normes en sera la limite. La transparence deviendra une obligation ; quiconque voudra ne pas faire connaître ses appartenances, ses moeurs, son état de santé ou son niveau de formation sera a priori suspect. L'accroissement de la durée de la vie donnera le pouvoir aux plus âgés, qui choisiront de s'endetter. Les Etats s'effaceront devant les entreprises et les villes. Des hypernomades dirigeront un empire hors sol, sans centre, ouvert : un hyperempire. Chacun n'y sera plus loyal qu'à lui-même ; les entreprises ne se reconnaîtront plus aucune nationalité ; les pauvres constitueront un marché parmi d'autres ; les lois seront remplacées par des contrats, la justice par l'arbitrage, la police par des mercenaires. De nouvelles diversités s'installeront ; des spectacles et des sports verront le jour pour distraire les sédentaires, pendant que des masses immenses de nomades de misère, les infranomades, bousculeront les frontières pour chercher de quoi survivre. Des compagnies d'assurances, devenues régulateurs du monde, y fixeront les normes auxquelles devront se plier les Etats, les entreprises et les particuliers. Des organismes privés de gouvernance veilleront, pour le compte de ces assureurs au respect de ces normes. Les ressources se feront plus rares, les robots plus nombreux. Le temps, même le plus intime, sera presque entièrement occupé par l'usage de marchandises. Un jour même, chacun se verra proposer d'être autoréparé, puis de produire de prothèses de lui-même, enfin d'être cloné. L'homme deviendra alors artefact d'artefacts, cannibale mangeur d'objets cannibales, victimes de maux nomades.


(Extrait de "Une brève histoire de l'avenir" de Jacques Attali/Fayard)

à suivre...

22/06/2010

Une brève histoire de l'avenir...(7)

 

images.jpegProgressivement, et malgré des réactions de plus en plus violentes, le marché a transformé, sur des territoires de plus en plus vastes, l'essentiel des services (l'alimentation, les vêtements, le loisir, le logement, le transport, la communication), rendus d'abord gratuitement - de bon gré ou sous la contrainte-, en services marchands ; puis il les a transformés en objets industriels produits en série, en véritables outils de l'autonomie individuelle.

Progressivement aussi, la liberté marchande a contribué à faire naître la liberté politique, d'abord pour une minorité, puis pour beaucoup, au moins formellement, sur des territoires de plus en plus vastes, remplaçant presque partout le pouvoir religieux et militaire. Au total, la dictature a laissé naître le marché, qui a engendré la démocratie. Ainsi se sont installées, à partir du XIIe siècle, les premières démocraties de marché.

Progressivement encore, leur espace géographique s'est étendu ; le coeur du pouvoir sur l'ensemble de ces démocraties de marché s'est peu à peu déplacé vers l'ouest : il est passé du XIIe siècle du Proche-Orient à la Méditerranée, puis à la mer du Nord, à l'océan Atlantique, et enfin, aujourd'hui, au Pacifique, Neuf "Coeurs" se sont alors succédé : Bruges, Venise, Anvers, Gènes, Amsterdam, Londres, Boston, New-York, et aujourd'hui Los Angeles. L'ensemble du monde, mis à part la Chine et le Moyen-Orient, est désormais partie prenante de cet Ordre marchand.

(Extrait de "Une brève histoire de l'avenir" de Jacques Atalli/Fayard)

à suivre...