01/11/2010
Poème du Jour...
FIEVRE
Fièvre ton sexe est un crabe
Fièvre les chats se nourrissent à tes mamelles vertes
Fièvre la hâte de tes mouvements de reins
L'avidité de tes muqueuses cannibales
L'étreinte de tes tubes qui tressaillent et qui clament
Déchirent mes doigts de cuir
Arrachent mes pistons
Fièvre éponge morte gonflée de mollesse
Ma bouche court le long de ta ligne d'horizon
Voyageuse sans peur sur une mer de frénésie.
(Poème de Joyce Mansour)
07:41 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, mansour, extrait, fièvre, surréaliste
17/10/2010
La Poésie Surréaliste...
André Breton
LA POESIE SURREALISTE
La poésie surréaliste n'est pas d'essence différente de celle de toute poésie authentique. Elle est une et multiple, ainsi que l'attestent la diversité de ses chemins, le registre étendu de ses voix, dans le concert desquelles il n'est pas besoin d'être un spécialiste pour distinguer celle d'Eluard de celle de Breton, celle d'Aragon de celle d'Artaud, celle de Jean-Pierre Duprey de celle Joyce Mansour. Le surréalisme se veut "un moyen de libération totale de l'esprit" et il est, en son principe même, révolte. L'esprit qui l'anime se veut tourné vers l'avenir, porté vers ce qui vient, ce qui cherche par opposition à tout ce qui est achevé, fixé. D'où son éblouissante actualité. La poésie surréaliste nous propose le visage le plus convulsif, le plus pur et le plus somptueux de cette "liberté couleur d'homme" dont parle André Breton.
08:54 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : poésie, surréaliste, breton, voix
08/10/2010
Le Poème du jour...
SALON MEUBLE
Dans le jour très sombre - de cette nuance spécialement sinistre que laissent filtrer par une après-midi d'août torride les persiennes rabattues sur une chambre mortuaire - sur les murs peints de cet enduit translucide, visqueux pour l'oeil et au toucher dur comme le verre, qui tapisse les cavernes à stalactites, une légère écharpe d'eau sans bruit, comme sur les ardoises des vespasiennes, frissonnante, moirée, douce comme de la soie. Les rigoles confluant dans un demi-jour à l'angle gauche de la pièce nourrissent avant de s'échapper une minuscule cressonnière. Côté droit, dans une grande cage de Faraday à l'épreuve des coups de foudre, jetée négligemment sur les bras d'une chaise curule comme au retour d'une promenade matinale, la toge ensanglantée de César, reconnaissable à son étiquette de musée de l'aspect sui generis de déchirures particulièrement authentiques. Une horloge suisse rustique, à deux tons, avec caille et coucou, sonnant les demies et les quarts pour le silence d'aquarium. Sur la cheminée, victimes de je ne sais quelle spécialement préméditée mise en évidence au milieu d'une profusion de bibelots beaucoup plus somptueux, un paquet de scaferlati entamé et la photographie en premier communiant (carton fort, angles abattus, tranche épaisse et dorée, travail sérieux pour familles catholiques, avec la signature du photographe) du président Sadi-Carnot. Dans la pénombre du fond du salon, un wagon de marchandises avec son échauguette, sur sa voie de garage légèrement persillée de pâquerettes et d'ombellifères, laisse suinter par sa porte entrebâillée l'étincellement d'un service en porcelaine de Sèvres, et le bel arrangement des petits verres à liqueur.
(Poème de Julien Gracq " Le Salon Meublé")
12:32 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, gracq, surréaliste, salon meublé, découvrir
28/08/2010
Poème du jour...
DEHORS LA NUIT EST GOUVERNEE
Peuple de roseaux bruns lèvres de pauvreté dentelles haletantes
au levant de son sillage gravi entrée en flammes
Je baise l'emplacement de sa chair fondée
Derrière la vitre toutes les fièvres écrasées bourdonnent se raffinent
Lauréat des yeux transportés
Jusqu'au torrent pour la lécher au fond de sa faille
Secoue- toi infirme vent de portefaix
Tu pèses nuisible sur le commerce des grades
Son encontre n'a pas renoncé au feuillage de la lampe
Les liens cèdent L'île de son ventre marche de passion et de couleurs s'en va
La hampe du coquelicot révolte et fleur meurt dans la grâce
Tout calme est une plainte une fin une joie
Monstre qui projetez votre humus tiède dans le printemps de sa ville
Ventouse renversée au flanc de l'agrément du ciel
Souffrez que nous soyons vos pélerins extrêmes
Semeurs ensevelis dans le labyrinthe de votre pied.
(Dehors la nuit est gouvernée - 1938 - René CHAR)
08:10 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, rené char, la nuit est gouvernée, surréaliste