Allez les yeux invisibles vers le beau.

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15/03/2015

Poème du jour...

MONDE

 

monde,poésie,breton,surréaliste,écrivain,poète,livre,réflexions,comprendre,savoir,connaîtreDans le salon de madame des
Ricochets
Les miroirs sont en grains de rosée pressés
La console est faite d'un bras dans du lierre
Et le tapis meurt comme les vagues
Dans le salon de madame des
Ricochets
Le thé de lune est servi dans des œufs d'engoulevent
Les rideaux amorcent la fonte des neiges
Et le piano en perspective perdue sombre d'un seul bloc dans la nacre

Dans le salon de madame des
Ricochets
Des lampes basses en dessous de feuilles de tremble
Lutinent la cheminée en écailles de pangolin
Quand madame des
Ricochets sonne
Les portes se fendent pour livrer passage aux servantes en escarpolette.

 

 

André Breton

 

20/02/2013

Poème du jour...

images-2.jpeg Liberté

Sur mes cahiers d'écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable de neige
J'écris ton nom

Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J'écris ton nom

Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J'écris ton nom

Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l'écho de mon enfance
J'écris ton nom

Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J'écris ton nom

Sur tous mes chiffons d'azur
Sur l'étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J'écris ton nom

Sur les champs sur l'horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J'écris ton nom

Sur chaque bouffées d'aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J'écris ton nom

Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l'orage
Sur la pluie épaisse et fade
J'écris ton nom

Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J'écris ton nom

Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J'écris ton nom

Sur la lampe qui s'allume
Sur la lampe qui s'éteint
Sur mes raisons réunies
J'écris ton nom

Sur le fruit coupé en deux
Du miroir et de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
J'écris ton nom

Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
J'écris ton nom

Sur le tremplin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
J'écris ton nom

Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J'écris ton nom

Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attendries
Bien au-dessus du silence
J'écris ton nom 

Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J'écris ton nom

Sur l'absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J'écris ton nom

Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l'espoir sans souvenir
J'écris ton nom

Et par le pouvoir d'un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer

Liberté

Paul Eluard
in Poésies et vérités, 1942

16/03/2012

Poème du jour...

FEMME ET OISEAU

 

images-1.jpegLe chat rêve et ronronne dans la lutherie brune. Il scrute le fond de l'ébène et de biais lape à distance le tout vif acajou. C'est l'heure où le sphinx de la garance détend par milliers sa trompe autour de la fontaine de Vaucluse et où partout la femme n'est plus qu'un calice débordant de voyelles en liaison avec magniola illimitable de la nuit.

 

(Poème de André Breton)images-2.jpeg

07/12/2011

Poème du jour...

images-1.jpegCAFETIERE DE BEURRE

 

Les guides à la main semant sa jolie langue

tout essouflée avec une gaule amazone

la montagne bébé ramasse cinquante centimes

dans le jardin sangsue anémone

tombée d'une échelle carte postale.

Le frein de la salade en ceinture de cuir

une orange à la main souffle sur les vêtements

du patissier qui fait les vendanges à l'hôpital

du drapeau à la hampe de radis.

Nous sommes dans le grenier des merles

où l'aimable araignée porte des pépins

d'un air fatigué dans la large liqueur

des gilets en petits vers rongeurs.

Voltiger en l'air festin de chenille

c'est le risque du paradis de fer blanc

suspendu au plafond de la cheminée.

 

(Francis Picabia - " Poèmes et dessins de la fille née sans mère" - 1918 - Ed. "Belfond")

11/08/2011

Proses des ivresses... (11)

  

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LES REVERBERES AFRICAINS

 

J'étais ivre l'autre nuit d'un vin venu d'Europe et qui avait fait le voyage sur un bateau lent et secoué par la tempête. Ce vin qui avait des souvenirs marins et l'humeur impétueuse des flots, avait communiqué pour toujours à son essence spirituelle un caractère sauvage et tumultueux. La mer donne à ses amis un goût ardent de la liberté : ce vin avait un goût de corsaire ; en des temps meilleurs il se fût fait pirate, aurait mérité d'être pendu à une vergue dans le port de Londres, non loin de quelque celèbre capitaine. Je ne dirai rien de moi : ce vin merveilleux m'habitait.

Ainsi gréé, puissant comme un dieu, je partis au hasard des rues du Caire.

 

(Prose de Georges Limbour - extrait de "Soleil bas" - Ed. Gallimard)images-1.jpeg

à suivre...

 

 

( Portrait de Georges Limbour par Picasso...)

20/07/2011

Poème du Jour...

PORTE DU SECOND INFINI

 

A Antonin Artaud

 

L'encrier périscope me guette au tournant,

mon porte-plume rentre dans sa coquille.

La feuille de papier déploie ses grandes ailes blanches :

Avant peu ses deux serres m'arracheront les yeux.

Je n'y verrai que du feu mon corps

feu mon corps !

Vous eûtes l'occasion de le voir en grand appareil le jour de tous les ridicules.

Les femmes mirent leurs bijoux dans leur bouche comme Démosthème.

Mais je suis inventeur d'un téléphone de verre de Bohème et de tabac anglais

en relation directe avec la peur !

 

(Poème de Robert Desnos - "C'est les bottes de 7 lieues cette phrase " Je me vois" - 1926)images-1.jpeg

12/07/2011

Poème du Jour...

L'AMOUREUSE

Elle est debout sur mes paupières

Et ses cheveux sont dans les miens

Elle a la forme de mes mains

Elle a la couleur de mes yeux

Elle s'engloutit dans mon ombre

Comme une pierre sur le ciel.

 

Elle a toujours les yeux ouverts

Et ne me laisse pas dormir.

Ses rêves en pleine lumière

Font s'évaporer les soleils,

Me font rire, pleurer et rire,

Parler sans avoir rien à dire.

 

(Poème de Paul Eluard - " Mourir de ne pas mourir " - 1924)images-3.jpeg