Un arbre unique et solitaire fait offrande de ses ramures au ciel incandescent.
Nul ne sait par quel stratagème il a, dès son enfance, échappé à la main prédatrice de l’homme armé de fer, à la dent avide de l’animal famélique, à la rareté de l’eau et au dard du soleil plus que nulle part au sommet de son ardeur.
Alentour est le désert infini submergé de silence séculaire parfois troublé par la rumeur lointaine de troupeaux évanescents allant sur les dunes et les immenses plateaux ensemencés de rocailles.
Ici, l’espace et le temps sont confondus l’un par l’autre tenus, et n’ont d’autre mesure que la démesure de l’éternité. Dans cette vastitude lunaire librement parcourue de bise en février ou de vent en ouragan de sable, rugissant d’une fureur dont on ne sait la raison, l’arbre demeure en patience témoin superbe et pathétique d’un temps révolu.
En m’approchant de la colline où il se tient en vigile de silence, il grandit à mes yeux. Il s’anime à mes oreilles et la main qui en caresse le tronc me dit sa puissance.
Des battements sourds se font entendre. Je ne sais d’abord leur provenance, ils sont de mon propre cœur.
Car ici la rareté de la vie donne à la vie sa vraie mesure. Et en contemplant cet être magnifique drapé des secrets d’une longue histoire qu’il est seul à pouvoir conter, j’imagine ses innombrables compagnons que la terre nourrissait pour en être mieux nourrie.
Et dans cette réciprocité vitale s’exprimait toute l’intelligence de la vie car l’arbre n’est pas seulement racine, tronc, branche et feuillage, il est un pont vertical unissant les forces telluriques à celles du cosmos.
Il est prière incessante adressée à l’univers pour attirer tous les bienfaits de la vie sur la terre et les humains et sur toute créature de la création.
Tuer les arbres hors des nécessités d’une vie simple, c’est commettre un grave préjudice à la vie. C’est un délit passible des plus grandes tristesses. Les arbres disparus, il ne restera plus que vide et solitude et désert jusque dans les cœurs.











La respiration tonifiante :
... L'essentiel de ce que nous savons d'eux a été rapporté par des témoins de leur vie. Essentiellement par des disciples qui, en dépit du caractère élogieux du portrait qu'ils dressent, semblent avoir eu l'intention de transmettre un témoignage fidèle, montrant parfois leur maître avec ses qualités et ses défauts, ses humeurs aussi, son caractère quelquefois inégal. L'essentiel des travaux de recherche et d'exégèse ultérieurs ont été réalisés à partir des matériaux transmis par ces disciples, témoins directs ou indirects de leur parcours. Néanmoins, quelques indices extérieurs à ces cercles de fidèles sont là, aussi ténus soient-ils, pour confirmer l'historicité des personnages et leur inscription dans l'histoire.
Je me souviens que la première fois que nous avons voyagé ensemble aux Etats-Unis, Jim et moi, il y a bien des années, nous nous sommes assis sous un arbre pour partager une mandarine. Il a commencé à parler de nos projets futurs. - Chaque fois que nous avions de nouvelles idées, Jim, inspiré et séduit, devenait tellement absorbé qu'il perdait totalement contact avec la situation présente. - Il a englouti un quartier de mandarine et, avant même de le mâcher, s'est apprêté à en engloutir un second. Il ne savait même pas qu'il était en train de manger une mandarine ! Tout ce que j'ai eu besoin de dire a été : " Vous feriez peut-être mieux de manger d'abord le quartier que vous avez dans la bouche." Cette remarque a soudainement amené Jim à comprendre ce qu'il faisait. Il n'était pas vraiment en train de manger cette mandarine. En fait, ce qu'il mangeait, c'étaient ses projets d'avenir !