Allez les yeux invisibles vers le beau.

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18/09/2010

poème du jour...

 

Unknown-6.jpegLE BOULEVARD

 

La fraîcheur vive du boulevard pourri d'automne. Les larges feuilles des platanes dégringolent. C'est un écroulement imprévu et bizarre dans la lumière croisée des lampes à arc. Il tombe une petite pluie menue, serrée que le vent incline parfois sur les visages. La nuit est parfumée de l'odeur des feuillages gâtés : elle sent encore l'ambre, l'oeillet, la poudre, le fard et le caoutchouc des imperméables.

 

(Poème de Francis Carco)

14/09/2010

La Présence et l'Image...

 

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Que faire, eh bien, en tout cas, interroger à nouveau la poésie, que nous avons laissée tout à l'heure à cet état de tutelle où veut la tenir aujourd'hui, dès qu'il s'agit de la vérité, la philosophie du langage.

Interroger la poésie, ce qui dans ma destinée n'est d'ailleurs que la réaction la plus naturelle, puisque c'est déjà dans son expérience, au cours des années, que se sont présentées à moi les contradictions et les inquiétudes que je viens d'essayer de dire, mais aussi que se seront obstinés un espoir et une idée de l'espoir. En fait, ce que la critique a souligné, récemment, et de la place de l'inconscient dans les décisions des poètes, ceux-ci l'ont perçu les premiers, et au seuil de notre modernité, qui commença comme désagrégation de l'idée absolue du moi qu'il y avait chez les Romantiques, ils en avaient déjà fait leur préoccupation principale. L'autonomie du signifiant, Rimbaud ne l'ignorait pas quand il écrivait le sonnet Voyelles, ni Mallarmé quand il agença le Sonnet en yx. Et cet excès des mots sur le sens, ce fut bien ce qui m'attira pour ma part, quand je vins à la poésie, dans les rets de l'écriture surréaliste. Quel appel, comme d'un ciel inconnu, dans ces grappes de tropes inachevables ! Quelles énergie, semblait-il, dans ces bouillonnements imprévus de la profondeur du langage ! Mais, passée la première fascination, je n'eus pas joie à ces mots qu'on me disait libres. J'avais dans mon regard une autre évidence, nourrie par d'autres poètes, celle de l'eau qui coule, du feu qui brûle sans hâte, de l'exister quotidtien, du temps et du hasard qui en sont la seule substance, et il me sembla assez vite que les trangressions de l'automatisme étaient moins la sur-réalité souhaitable, au-delà des réalismes trop en surface de la pensée contrôlée, aux signifiés gardés fixes, qu"une paresse à poser la question  du moi, dont la virtualité la plus riche est peut-être la vie comme on l'assume jour après jour, sans chimères, parmi les choses du simple.

 

(Extrait de "La Présence et L'image" de Yves Bonnefoy/ Mercure de France - 1983)

28/08/2010

Poème du jour...

DEHORS LA NUIT EST GOUVERNEE

 

Peuple de roseaux bruns lèvres de pauvreté dentelles haletantes

au levant de son sillage gravi entrée en flammes

Je baise l'emplacement de sa chair fondée

Derrière la vitre toutes les fièvres écrasées bourdonnent se raffinent

Lauréat des yeux transportés

Jusqu'au torrent pour la lécher au fond de sa faille

Secoue- toi infirme vent de portefaix

Tu pèses nuisible sur le commerce des grades

Son encontre n'a pas renoncé au feuillage de la lampe

Les liens cèdent L'île de son ventre marche de passion et de couleurs s'en va

 

La hampe du coquelicot révolte et fleur meurt dans la grâce

Tout calme est une plainte une fin une joie

 

Monstre qui projetez votre humus tiède dans le printemps de sa ville

 

Ventouse renversée au flanc de l'agrément du ciel

Souffrez que nous soyons vos pélerins extrêmes

Semeurs ensevelis dans le labyrinthe de votre pied.

 

 

(Dehors la nuit est gouvernée - 1938 - René CHAR)

 

 

13/08/2010

instants poétique & musical...

06/08/2010

Poème du jour...

 

Unknown.jpegLE CANCRE


Il dit non avec la tête

mais il dit oui avec le coeur

il dit oui à ce qu'il aime

il dit non au professeur

il est debout

on le questionne

et tous les problèmes sont posés

soudain le fou rire le prend

et il efface tout

les chiffres et les mots

les dates et les noms

les phrases et les pièges

et malgré les menaces du maître

sous les huées des enfants prodiges

avec des craies de toutes les couleurs

sur le tableau noir du malheur

il dessine le visage du bonheur


(Poème de Jacques Prévert - "Paroles" /Folio)

17/06/2010

Poème du jour...

 

images.jpegLa cassure de terrain est une gorge

Ce mot creuse sans y mener. Ici l'on

s'entrecroise à vallon.

Ailleurs en continent. Repère amer.

Torse jusqu'au loin mâle engage à

l'échancrure femme.

 

Descend d'amont sans parenté la mer

aval.

 

(Poème de Jean-Damien Chéné - "Paysages, Lieux : Chez" / Le Dé Bleu (1998).

28/05/2010

Poème du jour...

 

images.jpegLA FILLE

 

Trente ans qu'elle est née ici, qu'elle a grandi, porté du grain aux poules, les seaux de lait, ses cahiers à l'école et qu'elle s'est échappé avec des garçons. Un jour, son père l'a conduite en ville pour y faire des études. Aujourd'hui qu'elle est tombée là, tout en noir et or, parmi ces vieux murs, ces outils rouillés, on dirait une anémone sortie dans la nuit sous un rocher dans un coin de montagne.

 

(Un extrait des poèmes de Georges L. Godeau / Editions Le Dé Bleu)