Allez les yeux invisibles vers le beau.

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06/02/2012

Poème du jour...


 

poésie, poète, bouguenec, les pommes, réflexion, détente



LES POMMES

 

J'en veux de brutalement gaulées

des victimes du vent.

J'en veux pas

de vos pommes calibrées

qui sont les poules de luxe.

J'en veux pas

de vos pommes cueillies une à une

avec des gants

de celles dont vous vantez les charmes

sur papier gaufré.

 

(Poème "Les Pommes" de Xavier Bouguenec - Ed. "Soc & Foc" - 2010)

24/01/2012

Poème du jour...

Londonienne

 

images-1.jpegFoin des bocks, on n'a plus dix-sept ans le long des docks. Bien secoué le sablier, écrasée la boîte de Campbell's soup. Ca fait une éternité tous ces jours qui ont roulé leurs os comme des pierres. Pop'art et pop'rock, on remonte à pattes d'éph et sous-marin jaune dans les dernières seventies. Vintage psychédélique. On repique de fleurs nos squelettiques ready-made. Quelle mousse s'est amassée au noir sabbat des vinyles ?

Londres fume et crie. Ô quelle ville de bible chantait Verlaine dans d'autres seventies de la machine à débobiner l'underground avec Rimbaud, refaisant la Commune dans les pubs de Leicester square. Le révolvérisé Arthur plus tard 178 Stanford street avec Germain Nouveau, son goût pour la flâne, son amour par les rues des réclames des murs fardés de couleurs crues.

Le coeur fou Robinsonne à travers les romans. Ce soir là... vous rentrez aux cafés éclatants. Ô papier bible qu'on humecte à travers les vapeurs de malt, ces lignes imaginaires d'une constellation poétique dans le brouillard du temps. Ô choc des vers dans nos nuits londoniennes à ces spectres nouveaux roulant à travers l'épaisse et éternelle fumée de charbon.


(Poème de Jean-Pierre Sautreau extrait de "Les Dérivres Immobiles" - Ed. "Soc & Foc" - 2011)

14/01/2012

Poème du jour...

Les Pommes (suite)

 

images-1.jpegJ'en veux même des véreuses

des belles au coeur rongé

des qu'on garde pour la compote

des pâlottes

aux grains de beauté bruns.

J'en veux des tombées, des choquées

toutes chargées de souvenir d'aigail.

J'en veux qui sentent l'ajonc

des lumineuses, des frippées

des cabossées des inépuchables

des invendables

de pauvres pommes à cidre

qu'on entassait dans les resses.

J'en veux à la chair de femme

avec du rouge aux joues.

 

(Poème de Xavier Bouguenec - extrait de "Les Pommes" - Ed. "Soc & Foc" - 2010)


à suivre...

09/01/2012

Poème du jour...


Poésie, parménide, réflexion, détente, littérature, poète





Le Poème de Parménide


Les cavales qui m’emportent au gré de mes désirs, se sont élancées sur la route fameuse de la Divinité, qui conduit partout l’homme instruit;

c’est la route que je suis, c’est là que les cavales exercées

[5] entraînent le char qui me porte. Guides de mon voyage,

les vierges, filles du Soleil, ont laissé les demeures de la nuit et, dans la lumière, écartent les voiles qui couvraient leurs fronts. Dans les moyeux, l’essieu chauffe et jette son cri strident

sous le double effort des roues qui tournoient

[10] de chaque côté, cédant à l’élan de la course impétueuse.

Voici la porte des chemins du jour et de la nuit, avec son linteau, son seuil de pierre, et fermés sur I’éther ses larges battants,

dont la Justice vengeresse tient les clefs pour ouvrir et fermer.

[15] Les nymphes la supplient avec de douces paroles et savent obtenir que la barre ferrée soit enlevée sans retard; alors des battants

elles déploient la vaste ouverture et font tourner en arrière les gonds garnis d’airain

[20] ajustés à clous et à agrafes; enfin par la porte

elles font entrer tout droit les cavales et le char.

13/12/2011

Poème du jour...

 

Le vent

 

Sur la bruyère longue infiniment,
Voici le vent cornant Novembre ;
Sur la bruyère, infiniment,
Voici le vent
Qui se déchire et se démembre,
En souffles lourds, battant les bourgs ;
Voici le vent,
Le vent sauvage de Novembre.

Aux puits des fermes,
Les seaux de fer et les poulies
Grincent ;
Aux citernes des fermes.
Les seaux et les poulies
Grincent et crient
Toute la mort, dans leurs mélancolies.

Le vent rafle, le long de l'eau,
Les feuilles mortes des bouleaux,
Le vent sauvage de Novembre ;
Le vent mord, dans les branches,
Des nids d'oiseaux ;
Le vent râpe du fer
Et peigne, au loin, les avalanches,
Rageusement du vieil hiver,
Rageusement, le vent,
Le vent sauvage de Novembre.

Dans les étables lamentables,
Les lucarnes rapiécées
Ballottent leurs loques falotes
De vitres et de papier.
- Le vent sauvage de Novembre ! -
Sur sa butte de gazon bistre,
De bas en haut, à travers airs,
De haut en bas, à coups d'éclairs,
Le moulin noir fauche, sinistre,
Le moulin noir fauche le vent,
Le vent,
Le vent sauvage de Novembre.

Les vieux chaumes, à cropetons,
Autour de leurs clochers d'église.
Sont ébranlés sur leurs bâtons ;
Les vieux chaumes et leurs auvents
Claquent au vent,
Au vent sauvage de Novembre.
Les croix du cimetière étroit,
Les bras des morts que sont ces croix,
Tombent, comme un grand vol,
Rabattu noir, contre le sol.

Le vent sauvage de Novembre,
Le vent,
L'avez-vous rencontré le vent,
Au carrefour des trois cents routes,
Criant de froid, soufflant d'ahan,
L'avez-vous rencontré le vent,
Celui des peurs et des déroutes ;
L'avez-vous vu, cette nuit-là,
Quand il jeta la lune à bas,
Et que, n'en pouvant plus,
Tous les villages vermoulus
Criaient, comme des bêtes,
Sous la tempête ?

Sur la bruyère, infiniment,
Voici le vent hurlant,

 

Voici le vent cornant Novembre.

 

(Poème de Emile  Verhaeren extrait de "Les Villages illusoires")

07/12/2011

Poème du jour...

images-1.jpegCAFETIERE DE BEURRE

 

Les guides à la main semant sa jolie langue

tout essouflée avec une gaule amazone

la montagne bébé ramasse cinquante centimes

dans le jardin sangsue anémone

tombée d'une échelle carte postale.

Le frein de la salade en ceinture de cuir

une orange à la main souffle sur les vêtements

du patissier qui fait les vendanges à l'hôpital

du drapeau à la hampe de radis.

Nous sommes dans le grenier des merles

où l'aimable araignée porte des pépins

d'un air fatigué dans la large liqueur

des gilets en petits vers rongeurs.

Voltiger en l'air festin de chenille

c'est le risque du paradis de fer blanc

suspendu au plafond de la cheminée.

 

(Francis Picabia - " Poèmes et dessins de la fille née sans mère" - 1918 - Ed. "Belfond")

01/12/2011

Proses des Ivresses... (21)


images.jpeg


LE CAFE

 

C'est toi, divin café, dont l'aimable liqueur,

Sans altérer la tête épanouit le coeur !

Ainsi, quand mon palais est émoussé par l'âge

Avec plaisir encor je goûte ton breuvage.

Que j'aime à préparer ton nectar précieux,

Nul n'usurpe chez moi ce soin délicieux.

Sur le réchaud brûlant, moi seul, tournant la graine,

A l'or de ta couleur fais succéder l'ébène ;

Moi seul, contre la noix qu'arment ses dents de fer, 

Je fais, en le broyant, crier ton fruit amer,

Chargé de ton parfum, c'est toi seul qui, dans l'onde,

Infuses à mon foyer ta poussière féconde ;

Oui, tour à tour calmant, excitant tes bouillons,

Suis, d'un oeil attentif tes légers tourbillons.

Enfin, de ta liqueur, lentement reposée,

Dans la vase fumant, la lie est déposée ;

Ma coupe, ton nectar, le miel américain,

Que du suc des roseaux exprima l'Africain,

Tout est prêt ; du Japon, l'émail reçoit tes ondes

Et, seul, tu réunis les tribus des deux mondes.

Viens donc, divin nectar ! viens donc, inspire-moi :

Je ne veux qu'un désert, mon Antigone, et toi !

A peine j'ai senti ta vapeur odorante,  

Soudain de ton climat la chaleur pénétrante

Réveille tous mes sens, sans trouble, sans chaos,

Mes pensers plus nombreux, accourent à grands flots,

Mon idée était triste, aride, dépouillée ;

Elle rit, elle sort richement habillée,

Et je crois, du génie éprouvant le réveil,

Boire dans chaque goutte un rayon de soleil.

 

(Poème de Jacques Delille - extrait de "Oeuvres" - 1738-1813)