13/03/2013
Le Printemps des Poètes...
La poésie au coeur du combat, tel est le thème de la 4e édition
du Printemps des poètes à La Roche-sur-Yon. Qui, cette année,
se fait l'écho des récents printemps arabe, iranien, voire berbère
naguère, où les poètes ont su s'indigner pour accompagner la légitime
revendication à la dignité humaine. L'indignation constitue
l'essence du combat poétique, provoque l'entrée des poètes en
résistance à toute espèce de totalitarisme, l'histoire de la littérature
en témoigne : Victor Hugo en exil sous Napoléon le Petit, le
yonnais Jean Bouhier fondateur de l'École de Rochefort insoumise
à Pétain, le palestinien Mahmoud Darwich, les algériens Tahar
Djaout et Lounès Matoub et tant d'autres acteurs de la liberté.
C'est que, comme le soulignait l'écrivain Kateb Yacine, « il y
a une opposition irréductible entre le verbe libre (la poésie) et
le verbe religieux » et ses ersatzs, les idéologies politiques « ces
religions sans Dieu » (Hegel). Et si les circonstances l'imposent,
le combat de la poésie se change en poésie de combat où « le mot,
c'est un coup de fusil qui part » (formule de Farida Aït Ferroukh
lors d'un débat à La Roche-sur-Yon). Faut-il rappeler l'oeuvre de
résistance active des Char, Éluard, Aragon, Guillevic... ?
La poésie affouille le vif du langage. En cette période de crise qui
dépèce à vif le quotidien des hommes, est-il étonnant que l'on se
tourne vers les poètes ? Et insolite que ce sont de jeunes étudiantes
qui portent le projet de ce Printemps des poètes ? Et que cela se
passe à La Roche-sur-Yon qui entretient des liens de forte amitié
avec Tizi-Ouzou et le peuple Amazigh ? Pas vraiment. La poésie
vise au coeur de l'humain, tire une « salve d'avenir » (Machado). Ce
n'est pas un privilège de rencontrer les poètes invités lors de cet
événement, c'est une nécessité. À très bientôt, donc.
Louis Dubost
05:05 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, manifestation, printemps, dubost, littérature, voix
09/03/2013
Les grands auteurs... (2)
Premier discours
Pour entrer dans la véritable connaissance de votre condition, considérez-la dans cette image.
Un homme est jeté par la tempête dans une île inconnue, dont les habitants étaient en peine de trouver leur roi, qui s’était perdu ; et, ayant beaucoup de ressemblance de corps et de visage avec ce roi, il est pris pour lui, et reconnu en cette qualité par tout ce peuple. D’abord il ne savait quel parti prendre ; mais il se résolut enfin de se prêter à sa bonne fortune. Il reçut tous les respects qu’on lui voulut rendre, et il se laissa traiter de roi.
Mais comme il ne pouvait oublier sa condition naturelle, il songeait, en même temps qu’il recevait ces respects, qu’il n’était pas ce roi que ce peuple cherchait, et que ce royaume ne lui appartenait pas. Ainsi il avait une double pensée : l¹une par laquelle il agissait en roi, l’autre par laquelle il reconnaissait son état véritable, et que ce n’était que le hasard qui l’avait mis en place où il était. Il cachait cette dernière pensée et il découvrait l’autre. C’était par la première qu’il traitait avec le peuple, et par la dernière qu’il traitait avec soi-même.
Ne vous imaginez pas que ce soit par un moindre hasard que vous possédez les richesses dont vous vous trouvez maître, que celui par lequel cet homme se trouvait roi. Vous n’y avez aucun droit de vous-même et par votre nature, non plus que lui : et non seulement vous ne vous trouvez fils d’un duc, mais vous ne vous trouvez au monde, que par une infinité de hasards. Votre naissance dépend d’un mariage, ou plutôt de tous les mariages de ceux dont vous descendez. Mais d’où ces mariages dépendent- ils ? D’une visite faite par rencontre, d’un discours en l’air, de mille occasions imprévues.
Vous tenez, dites-vous, vos richesses de vos ancêtres, mais n’est-ce pas par mille hasards que vos ancêtres les ont acquises et qu’ils les ont conservées ? Vous imaginez-vous aussi que ce soit par quelque loi naturelle que ces biens ont passé de vos ancêtres à vous ? Cela n’est pas véritable. Cet ordre n’est fondé que sur la seule volonté des législateurs qui ont pu avoir de bonnes raisons, mais dont aucune n’est prise d’un droit naturel que vous ayez sur ces choses. S’il leur avait plu d’ordonner que ces biens, après avoir été possédés par les pères durant leur vie, retourneraient à la république après leur mort, vous n’auriez aucun sujet de vous en plaindre.
Ainsi tout le titre par lequel vous possédez votre bien n’est pas un titre de nature, mais d’un établissement humain. Un autre tour d’imagination dans ceux qui ont fait les lois vous aurait rendu pauvre ; et ce n’est que cette rencontre du hasard qui vous a fait naître, avec la fantaisie des lois favorables à votre égard, qui vous met en possession de tous ces biens.
Je ne veux pas dire qu’ils ne vous appartiennent pas légitimement, et qu’il soit permis à un autre de vous les ravir ; car Dieu, qui en est le maître, a permis aux sociétés de faire des lois pour les partager ; et quand ces lois sont une fois établies, il est injuste de les violer. C’est ce qui vous distingue un peu de cet homme qui ne posséderait son royaume que par l’erreur du peuple, parce que Dieu n’autoriserait pas cette possession et l’obligerait à y renoncer, au lieu qu’il autorise la vôtre Mais ce qui vous est entièrement commun avec lui, c’est que ce droit que vous y avez n’est point fondé, non plus que le sien, sur quelque qualité et sur quelque mérite qui soit en vous et qui vous en rende digne. Votre âme et votre corps sont d’eux-mêmes indifférents à l’état de batelier ou à celui de duc, et il n’y a nul lien naturel qui les attache à une condition plutôt qu’à une autre.
Que s’ensuit-il de là ? que vous devez avoir, comme cet homme dont nous avons parlé, une double pensée ; et que si vous agissez extérieurement avec les hommes selon votre rang, vous devez reconnaître, par une pensée plus cachée mais plus véritable, que vous n’avez rien naturellement au- dessus d’eux. Si la pensée publique vous élève au-dessus du commun des hommes, que l’autre vous abaisse et vous tienne dans une parfaite égalité avec tous les hommes ; car c’est votre état naturel.
Le peuple qui vous admire ne connaît pas peut-être ce secret. Il croit que la noblesse est une grandeur réelle et il considère presque les grands comme étant d’une autre nature que les autres. Ne leur découvrez pas cette erreur, si vous voulez ; mais n’abusez pas de cette élévation avec insolence, et surtout ne vous méconnaissez pas vous-même en croyant que votre être a quelque chose de plus élevé que celui des autres.
Que diriez-vous de cet homme qui aurait été fait roi par l’erreur du peuple, s’il venait à oublier tellement sa condition naturelle, qu’il s’imaginât que ce royaume lui était dû, qu’il le méritait et qu’il lui appartenait de droit ? Vous admireriez sa sottise et sa folie. Mais y en a-t-il moins dans les personnes de condition qui vivent dans un si étrange oubli de leur état naturel ?
Que cet avis est important ! Car tous les emportements, toute la violence et toute la vanité des grands vient de ce qu’ils ne connaissent point ce qu’ils sont : étant difficile que ceux qui se regarderaient intérieurement comme égaux à tous les hommes, et qui seraient bien persuadés qu’ils n’ont rien en eux qui mérite ces petits avantages que Dieu leur a donnés au-dessus des autres, les traitassent avec insolence. Il faut s’oublier soi-même pour cela, et croire qu’on a quelque excellence réelle au-dessus d’eux, en quoi consiste cette illusion que je tâche de vous découvrir.
Pascal
05:00 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pascal, écrivain, penseur, philosophe, discours, réflexion, comprendre, savoir, intelligence
06/03/2013
Poème du jour...
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La mer s’est retirée, J. Charpentreau |
06:13 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, charpentreau, réflexion, mer, joie, enfant, détente
04/03/2013
Pensée du Jour...
« Il faut chasser la bêtise parce qu'elle rend bête ceux qui la rencontrent. »
[ Bertolt Brecht ] - Extrait des Histoires de Monsieur Keuner
05:00 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bétise, brecht, pensée, réflexion, comprendre, savoir, rire
01/03/2013
Poème du jour...
La Paix est une fiction de notre Foi -
cloches par une Nuit d'Hiver
Emportant hors d'Ouïe le Voisin
Qui jamais ne mit pied à terre.
(Poème de Emily Dickinson - Extrait de "Quatrains" - Ed.Poésie/Gallimard - 2011)
10:15 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, poètesse, quatrains, réflexion, comprendre, savoir, gallimard, américaine
23/02/2013
Petit traité de vie intérieure... (5)
Dans mon cheminement personnel, mes lectures m'ont confronté dès l'adolescence à ces maîtres de sagesse de l'humanité. Ce sont eux qui m'ont donné le goût du beau, du vrai, du bien, pour reprendre les grands archétypes de Platon. Mes études de philosophie m'ont ensuite permis d'approfondir mes connaissances, mais j'ai aussi enrichi mon propre parcours intérieur de deux autres sources, de nature assez différentes : la spirualité et la psychologie des profondeurs. J'ai découvert le bouddhisme à l'âge de seize ans et les enseignements du Bouddha m'ont tout suite touché par leur justesse et leur caractère pragmatique. Je les ai approfondis lors d'un long séjour en Inde par des rencontres avec des lamas tibétains auprès desquels j'ai aussi appris les bases de la méditation. A l'âge de dix-neuf ans, la lecture des Evangiles a été également un choc profond. Ma découverte du Christ, non seulement comme enseignant du passé, mais aussi comme personne vivante à laquelle on peut se relier par la prière, a marqué ma vie et m'a fait accéder à une compréhension du christianisme fort différente des souvenirs du catéchisme de mon enfance. La découverte, ensuite, de la psychanalyse freudienne et jungienne ainsi que de diverses méthodes thérapeutiques issues du développement personnel (sophrologie, Gestalt, Rebirth...) m'a aidé à prendre davantage conscience de mes failles et à guérir de certaines blessures profondes qui parasitaient ma vie et me faisaient retomber dans des scénarios névrotiques récurrents.
(Extrait de "Petit traité de vie intérieure" de Frédéric Lenoir - Ed. "Plon" - 2010)
à suivre...
05:00 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : lenoir, spiritualité, livre, réflexion, comprendre, savoir, religions, cheminement, philosophie, philosophe
20/02/2013
Poème du jour...
Liberté
Sur mes cahiers d'écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable de neige
J'écris ton nom
Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J'écris ton nom
Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J'écris ton nom
Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l'écho de mon enfance
J'écris ton nom
Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J'écris ton nom
Sur tous mes chiffons d'azur
Sur l'étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J'écris ton nom
Sur les champs sur l'horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J'écris ton nom
Sur chaque bouffées d'aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J'écris ton nom
Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l'orage
Sur la pluie épaisse et fade
J'écris ton nom
Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J'écris ton nom
Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J'écris ton nom
Sur la lampe qui s'allume
Sur la lampe qui s'éteint
Sur mes raisons réunies
J'écris ton nom
Sur le fruit coupé en deux
Du miroir et de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
J'écris ton nom
Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
J'écris ton nom
Sur le tremplin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
J'écris ton nom
Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J'écris ton nom
Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attendries
Bien au-dessus du silence
J'écris ton nom
Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J'écris ton nom
Sur l'absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J'écris ton nom
Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l'espoir sans souvenir
J'écris ton nom
Et par le pouvoir d'un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer
Liberté
Paul Eluard
in Poésies et vérités, 1942
05:00 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : eluard, poésie, poète, liberté, réflexion, comprendre, savoir, surréaliste