12/10/2010
Ce que doivent être les choses... (6)
Et Nyad concluait :
- La grandeur du monde tient dans un sourire. Dans un sourire, le positif fait suggérer à la communauté son pouvoir de persuasion et fait naître le discours. Sa force est de grandir en nous, de nous éveiller aux entités qui peuplent la Terre. L'univers est dans nos consciences. Il faut savoir aller chercher un sourire où il se trouve, c'est là la clé qui nous ouvrira les portes des coeurs pour atteindre l'esprit. Tu vois, je raisonne, le bon sens me guide, je viens de percevoir ton âme, je suis en adéquation avec les êtres et les choses. Je te ressens, le langage a fait le reste.
J'avais compris que, moi, Lôl, j'étais né au monde.
(Extrait du chapitre 14 de "Ce que doivent être les choses" de Franck Roy/Pays d'herbes)
Suite & fin.
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08/10/2010
Le Poème du jour...
SALON MEUBLE
Dans le jour très sombre - de cette nuance spécialement sinistre que laissent filtrer par une après-midi d'août torride les persiennes rabattues sur une chambre mortuaire - sur les murs peints de cet enduit translucide, visqueux pour l'oeil et au toucher dur comme le verre, qui tapisse les cavernes à stalactites, une légère écharpe d'eau sans bruit, comme sur les ardoises des vespasiennes, frissonnante, moirée, douce comme de la soie. Les rigoles confluant dans un demi-jour à l'angle gauche de la pièce nourrissent avant de s'échapper une minuscule cressonnière. Côté droit, dans une grande cage de Faraday à l'épreuve des coups de foudre, jetée négligemment sur les bras d'une chaise curule comme au retour d'une promenade matinale, la toge ensanglantée de César, reconnaissable à son étiquette de musée de l'aspect sui generis de déchirures particulièrement authentiques. Une horloge suisse rustique, à deux tons, avec caille et coucou, sonnant les demies et les quarts pour le silence d'aquarium. Sur la cheminée, victimes de je ne sais quelle spécialement préméditée mise en évidence au milieu d'une profusion de bibelots beaucoup plus somptueux, un paquet de scaferlati entamé et la photographie en premier communiant (carton fort, angles abattus, tranche épaisse et dorée, travail sérieux pour familles catholiques, avec la signature du photographe) du président Sadi-Carnot. Dans la pénombre du fond du salon, un wagon de marchandises avec son échauguette, sur sa voie de garage légèrement persillée de pâquerettes et d'ombellifères, laisse suinter par sa porte entrebâillée l'étincellement d'un service en porcelaine de Sèvres, et le bel arrangement des petits verres à liqueur.
(Poème de Julien Gracq " Le Salon Meublé")
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05/10/2010
La petite note de Franck ... (22)
Cela fait longtemps que je voulais vous parler du site du journaliste Daniel Schneidermann et de ses émissions sur internet "Arrêt sur image". L'occasion se présente à moi après avoir vu l'excellent sujet sur le Capitalisme dans l'agréable émission de Judith Bernard "Dans le texte", émission qui se veut littéraire et qui déborde magnifiquement vers la philosophie, l'économie... En ce moment on peut voir le brillant et discret économiste Frédéric Lordon qui vient de sortir un livre aux Editions "La Fabrique" (voir ci-dessous) sur le "Capitalisme, désir et servitude" en est le titre. Je dois dire que j'apprécie tout particulièrement cette émission, tellement que le débat est intelligent et intéressant et plein d'enseignements. Des émissions comme cela il faut en exiger, tant que vous êtes plus intelligent après... je vous invite à vous abonner pour la modique somme de 35 Euros (l'année) sur ce site qui nous éloigne des bla-blas de la Télévision commerciale, il y a toujours des choses à voir et à comprendre en voici le lien :http://www.arretsurimages.net/.
(Rendez-vous pour une nouvelle petite... de Franck)
LE LIVRE DE FREDERIC LORDON :
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27/09/2010
Poème du Jour...
Comme il est appelé au soir en un lieu tel
que les portes battant sans fin
facilitent ou dénouent le tête-à-tête
hors de la crypte forestière il la traîne
au grand jour, ou plutôt il lui parle
il la dénude parmi les rafales de vent
ou plutôt il commence à se taire
avec une telle fureur dans les rayons
de la lumière verticale
une telle émission de silence comme un jet de sang
qu'elle se montre nue dans sa parole même
et c'est un corps de femme qui se fend.
(Extrait de "Proximité du murmure" du recueil "L'Embrasure" de Jacques Dupin/Gallimard)
* Jacques Dupin est né le 4 Mars 1927 à Privas (Ardèche)
Il a passé son enfance en Ardèche dans un asile psychiatrique, dont son père était directeur. Élevé avec les pensionnaires, dont l'un notamment donnera son nom à un poème, Chapurlat, il vit à Paris depuis 1943.
Il rencontre René Char, qui préface son premier recueil publié, Cendrier du voyage, chez GLM. Très tôt attendu comme le successeur de ce dernier, il prend le contre-pied en imposant, de livre en livre, une écriture atypique, souvent en ruptures. Ses textes suscitent l'admiration d'auteurs, de peintres comme Antoni Tàpies. Paul Auster traduit ses poèmes en anglais. Mais c'est dans l'ombre qu'œuvre Dupin, dans le retrait. Jamais tenté par le roman, à peine écrira-t-il une pièce de théâtre, proche tout de même de la forme poétique :L'Éboulement.
Il a travaillé pour plusieurs galeristes, en particulier pour la Galerie Maeght et la Galerie Lelong. Ce travail l'a amené à rencontrer de nombreux artistes modernes, au premier rang desquelsAlberto Giacometti et Joan Miró occupent une place majeure dans son œuvre. Expert de l'œuvre de Miró, il est président du comité de l'A.D.O.M., Association pour la défense de l'œuvre de Joan Miró, qui promeut l'œuvre du peintre et statue sur l'authenticité des œuvres qui lui sont soumises.
Chez Maeght, il participe à la revue L'Éphémère, mêlant critique d'art et poésie, avec Gaétan Picon, Louis-René des Forêts, Yves Bonnefoy et André du Bouchet.
Il obtient le Prix national de poésie en 1988.
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18/09/2010
poème du jour...
LE BOULEVARD
La fraîcheur vive du boulevard pourri d'automne. Les larges feuilles des platanes dégringolent. C'est un écroulement imprévu et bizarre dans la lumière croisée des lampes à arc. Il tombe une petite pluie menue, serrée que le vent incline parfois sur les visages. La nuit est parfumée de l'odeur des feuillages gâtés : elle sent encore l'ambre, l'oeillet, la poudre, le fard et le caoutchouc des imperméables.
(Poème de Francis Carco)
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14/09/2010
La Présence et l'Image...
Que faire, eh bien, en tout cas, interroger à nouveau la poésie, que nous avons laissée tout à l'heure à cet état de tutelle où veut la tenir aujourd'hui, dès qu'il s'agit de la vérité, la philosophie du langage.
Interroger la poésie, ce qui dans ma destinée n'est d'ailleurs que la réaction la plus naturelle, puisque c'est déjà dans son expérience, au cours des années, que se sont présentées à moi les contradictions et les inquiétudes que je viens d'essayer de dire, mais aussi que se seront obstinés un espoir et une idée de l'espoir. En fait, ce que la critique a souligné, récemment, et de la place de l'inconscient dans les décisions des poètes, ceux-ci l'ont perçu les premiers, et au seuil de notre modernité, qui commença comme désagrégation de l'idée absolue du moi qu'il y avait chez les Romantiques, ils en avaient déjà fait leur préoccupation principale. L'autonomie du signifiant, Rimbaud ne l'ignorait pas quand il écrivait le sonnet Voyelles, ni Mallarmé quand il agença le Sonnet en yx. Et cet excès des mots sur le sens, ce fut bien ce qui m'attira pour ma part, quand je vins à la poésie, dans les rets de l'écriture surréaliste. Quel appel, comme d'un ciel inconnu, dans ces grappes de tropes inachevables ! Quelles énergie, semblait-il, dans ces bouillonnements imprévus de la profondeur du langage ! Mais, passée la première fascination, je n'eus pas joie à ces mots qu'on me disait libres. J'avais dans mon regard une autre évidence, nourrie par d'autres poètes, celle de l'eau qui coule, du feu qui brûle sans hâte, de l'exister quotidtien, du temps et du hasard qui en sont la seule substance, et il me sembla assez vite que les trangressions de l'automatisme étaient moins la sur-réalité souhaitable, au-delà des réalismes trop en surface de la pensée contrôlée, aux signifiés gardés fixes, qu"une paresse à poser la question du moi, dont la virtualité la plus riche est peut-être la vie comme on l'assume jour après jour, sans chimères, parmi les choses du simple.
(Extrait de "La Présence et L'image" de Yves Bonnefoy/ Mercure de France - 1983)
05:01 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, présence, image, essai, bonnefoy, mercure de france
28/08/2010
Poème du jour...
DEHORS LA NUIT EST GOUVERNEE
Peuple de roseaux bruns lèvres de pauvreté dentelles haletantes
au levant de son sillage gravi entrée en flammes
Je baise l'emplacement de sa chair fondée
Derrière la vitre toutes les fièvres écrasées bourdonnent se raffinent
Lauréat des yeux transportés
Jusqu'au torrent pour la lécher au fond de sa faille
Secoue- toi infirme vent de portefaix
Tu pèses nuisible sur le commerce des grades
Son encontre n'a pas renoncé au feuillage de la lampe
Les liens cèdent L'île de son ventre marche de passion et de couleurs s'en va
La hampe du coquelicot révolte et fleur meurt dans la grâce
Tout calme est une plainte une fin une joie
Monstre qui projetez votre humus tiède dans le printemps de sa ville
Ventouse renversée au flanc de l'agrément du ciel
Souffrez que nous soyons vos pélerins extrêmes
Semeurs ensevelis dans le labyrinthe de votre pied.
(Dehors la nuit est gouvernée - 1938 - René CHAR)
08:10 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, rené char, la nuit est gouvernée, surréaliste